Le 10 avril dernier nous sommes allés visiter le Port-Musée de Douarnenez. Depuis le temps que nous sommes revenus dans le coin après nos 2 mutations à Toulon et 1 en Nouvelle-Calédonie, nous n’avions pas visité encore ce Musée. C’était une lacune car il est très bien fait et l’on en apprend des choses ! Voici la plus inattendue…!
Un peu d’histoire tout d’abord… et pas n’importe laquelle ! Il s’agit de l’Histoire de la boite de sardines et je vous entends d’ici me demander : « Mais qu’est-ce que viens faire notre Jehanne avec une boite de sardine ? Allo quoi ! C’est loufoque ! ». Patience !
Je vous passe tout ce que nous avons vu, lu, entendu dans le Musée, l’important n’étant pas là pour l’instant… . Donc, pour éviter principalement que vous vous lassiez d’attendre, je vais droit au but ! Mais vous n’y perdez rien, car nous verrons plus tard ce que je tais aujourd’hui ! Soyez-en sûrs !
Nous nous engouffrons dans le Port-Musée qui est installé dans une ancienne conserverie de sardines. Dans un premier temps je vais vous raconter l’évolution de la mise en boite de la sardine. Dans un deuxième temps, je vous révèlerai le pourquoi de la présence de Jehanne dans ce milieu aquatique et de fer-blanc !
En 1795 apparaît en France l'invention de l’appertisation (clic) par Nicolas Appert (clic), méthode stérilisatrice qui permet de conserver les aliments pendant plusieurs années.
En 1810, la première boite de sardines portant une étiquette en cuivre au nom de Joseph Colin (Un nom prédestiné !), considéré comme le fondateur de l’industrie de la conserve, apparaît à son tour. À sa mort en 1815, son fils Pierre-Joseph Colin reprend le flambeau et c’est en 1824 qu’il crée une manufacture capable de fabriquer en masse des boites de conserve. « Ces premières boîtes en fer-blanc se composent de 3 pièces découpées puis soudées à la main au rythme de 6 boîtes par heure ».
P-J Colin (photo du Net)
« En 1866, est bâtie l’usine symbole, le fleuron de l’industrie douarneniste : l’usine Wenceslas Chancerelle, appelée « Wences ». Immédiatement, bien sûr, des apprentis soudeurs sont embauchés ». Pendant que les ouvriers soudeurs fabriquaient les boites de manière rudimentaire, les femmes travaillaient à la mise en boites des sardines.
Photos prises sur place
Bon d’accord, me direz-vous, mais … pourquoi la Jehanne ? C'est insensé ! J’y viens, mais laissez-moi compter fleurette encore un peu avec l’Histoire !
En 1909, furent installées des sertisseuses ! Le sertissage est une opération d’assemblage de deux pièces. Pour y arriver, on procède sans l’écraser à la déformation de la matière. Cette invention répondra aux besoins de la marine et des armées, puis sera également utilisée par les collectivités avant d’arriver doucement dans les foyers. À moitié du XXème siècle elle est utilisée partout dans le monde !
Photos prises sur place
À Douarnenez, les premières sertisseuses sont prises à partie. « Ces nouvelles machines ou sertisseuses, travaillent 300 à 400 boîtes à l’heure, quand un bon ouvrier en ferme 60 à 70… La concurrence est, pour le moins, défavorable ! ». S’en suivra des jours de révolte ! En 1902, le conflit éclate ! « Ah, ça ira, ça ira, ça ira, toutes les machines on les brisera » (clic) ! « En 1909, c’est à Concarneau que la fureur des soudeurs va se manifester avec une extrême violence, dans la nuit du 11 au 12 juillet. De véritables scènes d’émeute sont vécues à travers la ville ». Les machines sont saccagées ! Il faut lire ce que je vous mets en lien ci-dessus pour se rendre compte de l’importance des émeutes ! … qui nous en rappellent d’autres, plus actuelles celles-là !
Mais passons… et revenons à nos moutons ! Que fait donc Jehanne dans cette galère ? J’ai épluché tous les textes trouvés sur le sujet et je vous livre ci-dessous quelques extraits qui vont jeter la lumière sur ce mystère :
« Au lendemain de la Première Guerre mondiale, la France réunie, libre et souveraine se cherche et se trouve un symbole avec cette sainte officiellement canonisée et proclamée sainte patronne de la France par le pape Pie XI en 1922 ».
Images du Net
Suite à cette canonisation, « la Pucelle la plus célèbre de l'histoire de France a prêté sa figure à bien des campagnes commerciales… » :
« Jeanne d'Arc appuyée sur un vélo, Jeanne d'Arc dessinée sur un emballage de fromage (clic), Jeanne d'Arc représentée sur une canette de bière ou sur une boîte de sardines ou de maquereaux, Jeanne d'Arc en fée du logis vantant les mérites d'un détergent ! » « Une centaine de pièces originales de ce matériel publicitaire apparu sur le marché dans les années 1920, à une époque où personne ne parlait de produits dérivés ou de plan marketing… »
Images du Net
Photos prises sur place
« De 1970 à 1980, la conserverie Gaston Chancerelle de Douarnenez avait trouvé son inspiration dans une représentation de Jeanne d'Arc sur son cheval. Car l'exploitation commerciale de l'image johannique est pareillement multiforme : Jeanne au combat, Jeanne en prière, Jeanne de profil, Jeanne en armure ou Jeanne à l'étendard, les marques avaient l'embarras du choix ». Mais alors, pourquoi une boîte de sardines ? Et pourquoi pas !
Image du Net
« En utilisant l'image de Jeanne d'Arc, née vers 1412 à Domrémy et morte au bûcher à Rouen 19 ans plus tard, l'objectif semble clair : une marque veut y affirmer une identité claire et des valeurs offensives ». « Il en va alors de cette opération comme de toute campagne publicitaire : Ainsi le benzine Jeanne d'Arc, de la marque Buhler, est « le gardien de la propreté domestique ». Sans oublier la lessive Jeanne d'Arc, « la lessive qui parfume » grâce à un procédé exemplaire, à base de chlore et d'acide, « qui nettoie et aseptise sans brûler ». Cela n’est pas forcément de bon goût, mais ça marche !
Images du Net
Voilà donc la réponse qui marque la fin de notre épopée étonnante ! Je ne pensais pas avoir tout cela à vous dire en commençant cet article ! Ouf ! Je salue votre endurance et votre perspicacité ! Merci à vous tous !
Ah ! Petite précision pour conclure : Un collectionneur de boites de sardines est un puxisardinophile ou un clupéidophile. Ceci dit en passant, des fois que l’un d’entre vous serait tenté de le devenir ! hi hi !
Et mardi 24 mai…
Douarnenez !
Claire-Cerise
Même la Marine Nationale avait sa Jeanne, mais là, le rapport était logique !
Merci Pat d'y avoir pensé.
Image du Net